En deux ans, ce sont près de 4000 individus qui ont eu recours à l'euthanasie en Belgique, dont 124 en raison de "troubles comportementaux, mentaux ou psychologiques".
Atlantico : Selon la note de synthèse de l’Institut Européen de Bioéthique, basée sur le rapport 2016 officiel de la Commission d’Évaluation et de contrôle de l’euthanasie belge, les euthanasies sont en hausse de 41% sur les quatre dernières années en Belgique. Les motifs invoqués en cas d'euthanasie vous semblent-ils toujours légitimes ? Quelles sont les principales dérives à craindre ? Quelle est la responsabilité des pouvoirs publics belge ?

Carine Brochier : Ces chiffres font part des euthanasies officielles. Nous n'avons pas accès aux euthanasies qui auraient été pratiquées sans être déclarées. Il est essentiel de le rappeler.

Au sein des chiffres officiels, il importe de se pencher sur les différents motifs susceptibles de donner lieu à une euthanasie.

L'un d'entre eux pose question : il s'agit des poly-pathologies. Les poly-pathologies constituent un ensemble de pathologies qui ne sont pas nécessairement finales ou mortelles. Souvent, elles touchent des personnes âgées. Celles-ci peuvent se retrouver, par exemple, incapables de marcher à la suite d'une opération. Elles accumulent différentes pathologies au fur et à mesure (maux de hanches, douleurs au genou, ostéoporose, difficulté à voir clair, etc.). Au final, elles sont souvent de plus en plus dépendantes des autres et de leur environnement. Parfois elles sont en maison de repos ou de soin. Les contacts sociaux s'amenuisent petit à petit. Les proches et la famille ne se rendent plus nécessairement à leur chevet. En un sens, la société parque ces personnes âgées – de façon tout à fait humaine, certes – ce qui génère néanmoins de la solitude et devient insupportable pour ces individus. Cette addition de maux, liés à la vieillesse et à la solitude (ainsi qu'au désespoir qui en découle) engendre un nombre considérable des demandes d'euthanasie. Nous faisons face à un problème de vieillissement de nos sociétés, couplée à un isolement qui constitue un danger. Indéniablement, cela soulève la question de la place que nous accordons à nos personnes âgées. Ce n'est qu'un exemple, mais il est parlant.

Un autre exemple de motif d'euthanasie en Belgique, c'est la démence. Des patients atteints de démence ou de troubles psychologiques, d'Alzheimer, de dépression, ont été euthanasiés. Les chiffres sont d'ailleurs effrayants : entre 2014 et 2015, 124 individus ont été euthanasiés pour des troubles mentaux ou comportementaux comme la dépression. Nous n'avons pas été assez bons, pas assez patients, n'avons pas fait preuve d'assez de persévérance. Ces personnes n'étaient pas en phase terminale, loin de là.
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Auteur de l'article original: Carine Brochier
Source: Atlantico.fr
Date de publication (dans la source mentionnée): Lundi, 24. Octobre 2016
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