Le ministre de la Santé, Philippe Douste-Blazy, un mois et demi après le drame de Pau, présente vendredi les grandes lignes d'un plan de santé mentale, réclamé par les professionnels de santé qui espèrent des moyens humains et financiers pour sortir de la "crise" de la psychiatrie.

Décloisonnement des intervenants médicaux, renforcement des droits des malades, programmes spécifiques pour traiter la dépression : le projet, selon un document de travail dont l'AFP a obtenu copie, portera sur la période 2005-2007.

Le plan sera soumis à la "concertation" des organisations syndicales avant toute finalisation, alors que le ministre a déjà annoncé un moratoire sur la fermeture des lits dans les hôpitaux psychiatriques.

Ce plan devrait être doté d'une enveloppe de 200 millions d'euros, avait annoncé M. Douste-Blazy en décembre, peu après le double homicide d'une infirmière et d'une aide soignante à l'hôpital psychiatrique de Pau.

Il vise à répondre aux maux dont souffre le système français : "cloisonnements entre spécialistes et médecins généralistes", "recours limité aux psychologues", "insuffisance de la capacité de réponse du secteur médico-social", "forte inégalité de répartition territoriale des professionnelle" et "décroissance démographique des psychiatres", selon ce texte.

L'Observatoire de la démographie des professions de santé prévoit que le nombre de psychiatres (privé/public) devrait passer de 13.727 aujourd'hui à 8.816 en 2025, alors que les besoins ne cessent de croître.

Le plan souhaite aussi "renforcer les droits des malades et de leurs proches", notamment par l'expertise d'une réforme du dispositif d'hospitalisation sans consentement. Il prévoit aussi des "programmes spécifiques" pour améliorer "la prise en charge de la dépression, responsable d'une grande partie des 12.000 décès annuels par suicides", renforcer les équipes hospitalières en milieu pénitentiaire et favoriser le traitement "des personnes en situation de précarité et d'exclusion".

Professionnels et syndicats, qui redoutent des "effets d’annonce", jugent le montant annoncé de l'enveloppe - 200 millions d'euros - largement insuffisant. "Cela ne représente que 2,7% du budget annuel alloué à la psychiatrie publique, à peine plus que l'inflation!", a relevé le secrétaire général du Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH), Jean-Claude Pénochet.

L'Association des établissements gérant des secteurs de santé mentale (ADESM) estime qu'"il faudrait injecter un milliard d'euros pour remettre à flot la psychiatrie".

"La priorité aujourd'hui, c'est de prendre des mesures énergiques pour stopper le déficit démographique des psychiatres et des autres personnels. Il y a des régions entières qui se désertifient", a estimé le président du Syndicat des psychiatres de secteur (SPS), Norbert Skurnik, en souhaitant également que soit mieux reconnue "la pénibilité du travail".

"On ne pourra améliorer la sécurité, la qualité de la prise en charge, les alternatives à l'hospitalisation, sans les effectifs correspondant aux besoins", approuve la fédération FO-Santé.

Pour la CGT, "il faut rouvrir des lits en hôpital psychiatrique. Il ne s'agit pas d'un retour à une politique asilaire, mais de constater qu'on manque de place, ce qui entraîne des sorties prématurées", a souligné Nadine Prigent.

Source : AFP

Date de publication (dans la source mentionnée): Dimanche, 6. Février 2005