Pour la première fois, une équipe de chercheurs français montre la suractivation compensatrice du cerveau.

Pendant plusieurs années, une personne qui va déclarer une maladie d’Alzheimer parvient à maintenir ses performances cérébrales. «Le cerveau est capable de maintenir la fonction alors qu’il y a une altération de sa structure», explique le Pr Bruno Dubois, chef du centre des maladies cognitives et comportementales de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière APHP (Assistance publique des hôpitaux de Paris), qui pilote l’étude Insight-preAD dont les résultats après trente mois de suivi viennent d’être publiés dans la revue Lancet Neurology.

La corrélation entre la structure du cerveau et son fonctionnement reste mal comprise. Car si la maladie ne passe pas inaperçue au stade symptomatique, avec en particulier les troubles de la mémoire, on sait désormais que les lésions se forment silencieusement pendant des années, voir des décennies auparavant. «Tous les essais cliniques pour traiter la maladie d’Alzheimer ont échoué, mais tous étaient conduits chez des patients symptomatiques», remarque Renaud La Joie, spécialiste de l’imagerie cérébrale et chercheur au Memory and Aging Center de l’université de Californie, à San Francisco.

D’où l’idée des chercheurs d’intervenir plus tôt, grâce à des médicaments par exemple, bien avant que n’apparaissent les symptômes, pour enrayer la constitution des lésions cérébrales. Mais il est inimaginable de proposer d’éventuels traitements préventifs à toute la population. Il faut donc identifier dans la population générale, ceux qui sont le plus à risque de développer un jour la maladie. «Si l’on fait des essais sans discernement, on échouera, prédit le Pr Dubois, il faut être beaucoup plus subtil dans le recrutement des participants les plus à risque.»

L’étude Insight-preAD apporte ainsi des pistes intéressantes. Elle portait sur 318 volontaires âgés en moyenne de 76 ans (70 à 85 ans), se plaignant de troubles de la mémoire, mais ayant des résultats normaux aux tests. Les chercheurs escomptaient un taux de conversion assez important vers la maladie «symptomatique» au cours des trente premiers mois de suivi, étant donné que 88 d’entre eux présentaient déjà des dépôts de protéines bêtas amyloïdes significatifs dans le cerveau - amyloïde (+) - au début de l’étude. En réalité, seulement quatre ont effectivement développé des troubles cognitifs.

«Ces quatre personnes étaient toutes amyloïdes (+) au début de l’étude. Ce qui confirme que les plaques amyloïdes sont bien une condition nécessaire, mais probablement pas suffisante de la maladie d’Alzheimer, explique le Pr Dubois.  (...)

Auteur de l'article original: Damien Mascret
Source: Le Figaro Santé
Date de publication (dans la source mentionnée): Dimanche, 4. Mars 2018
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