Comment les bébés reconnaissent les émotions de leur mère
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Le fœtus associe, dans le ventre de sa mère, sons et émotions, et les mémorise. Cet apprentissage aura, à la naissance, un impact sur ses réactions.
Chez l'homme comme chez bien des espèces animales – que ce soit parmi les oiseaux, les crocodiles ou les mammifères –, le fœtus est capable de percevoir des stimuli externes, et en particulier des sons, au moins à la fin de son développement. Les sons perçus peuvent être naturels (comme la voix de la mère), ou artificiels (musique). Et le fœtus fait la différence entre ceux qui lui sont ou non familiers. Cette expérience sensorielle prénatale est naturellement mémorisée. Tant et si bien que, dès la naissance, le petit de l'homme reconnaît la voix de sa mère, et il peut même montrer une préférence pour des musiques qu'elle a écoutées à la fin de sa grossesse.
Il y a donc transmission « transnatale », c'est-à-dire du stade fœtal au stade postnatal. Et c'est vrai pour différentes modalités sensorielles. Un exemple ? De tout jeunes rats dont les mères ont été placées en apesanteur pendant la gestation présenteront des perturbations de l'équilibre. De fait, le comportement et la physiologie de leur mère sont une source majeure d'expériences sensorielles pour le fœtus : si elle ressent des émotions pendant qu'elle réalise une tâche, on observe alors chez lui des changements de rythme cardiaque.
Jusqu'à quel point peut-il mémoriser les associations ?
Capable d'apprentissage par association – en mémorisant le lien entre un stimulus et son ressenti –, le fœtus est donc sensible aux émotions ressenties par sa mère. Mais jusqu'à présent, aucune étude ne permettait de rapprocher ces deux processus. Jusqu'à quel point le fœtus peut-il associer des stimuli perçus en même temps que les émotions ressenties par sa mère, puis mémoriser cette association ? C'est précisément la question que nous nous sommes posée au sein des Laboratoires physiologie, environnement et génétique pour l'animal et les systèmes d'élevage et éthologie animale et humaine.
Pour y répondre, nous avons choisi un modèle animal : le cochon. Avec l'idée de tester si des sons diffusés à la mère pendant la gestation, tout en lui faisant vivre des expériences plus ou moins positives sur le plan émotionnel, pouvaient ensuite avoir un impact sur les réactions des petits à l'écoute de ces mêmes sons. Ayant une audition très développée et des capacités cognitives reconnues, tout en faisant l'objet d'élevages et en se laissant facilement manipuler, le cochon constituait le modèle idéal. Nous avons donc fait la lecture de textes diffusés par haut-parleurs, tout en y associant des expériences émotionnelles positives ou négatives chez des truies gestantes. Puis nous avons observé la réaction des porcelets à ces mêmes textes, juste après leur naissance et dans les semaines suivantes.
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