Comment devenir masseur-kinésithérapeute lorsqu'on est déficient visuel ? C'est en effet une profession qui comporte un grand nombre de malvoyants (environ 2.000 sur un total de 85.000 masseurs kinésithérapeutes exerçant en secteur libéral ou en tant que salariés). Une particularité historique qui remonte à la fin de la première guerre mondiale, où des aveugles de guerre ont été amenés à se former. Aujourd'hui, de nouveaux outils pédagogiques font irruption, parmi lesquels des articulations imprimées en 3D ! C'est la voie explorée par un prototype développé par le Groupement des intellectuels aveugles ou amblyopes (GIAA - l'amblyopie décrit une différence d'acuité importante entre les 2 yeux) et la Fondation Dassault Systèmes, dévoilé le 4 janvier 2018 à l'occasion de la journée mondiale du braille. Entretien croisé avec les fondateurs de ce projet et avec des étudiants et praticiens eux-mêmes aveugles ou malvoyants.

L'audio, plus fédérateur que le braille
"Le GIAA est une association qui s'est constituée il y a 70 ans, relate Pierre Vassal, directeur administratif et chef de projet 3D au GIAA. Au départ, il s'agissait d'un groupement d'étudiants en droit qui enregistraient leurs cours à l'oral, sur bande magnétique, afin de permettre à leurs homologues malvoyants de pouvoir y accéder. Aujourd'hui, nous disposons d'une large base d'œuvres culturelles sous forme d'enregistrements sonores." Pourquoi construire des contenus basés sur l'audio et non sur le braille ? Le braille reste difficile à apprendre lorsque la cécité (ou déficience visuelle) survient au cours de la vie, explique Pierre Vassal.

ANATOMIE. Mais comment se représenter la structure tridimensionnelle d'une vertèbre à partir de seules informations verbales ? "On manque d'ouvrages scientifiques majeurs qui existeraient sous forme d'enregistrements audio", déplore-t-il."Les centres de formation à la masso-kinésithérapie pour les aveugles et malvoyants, qui sont au nombre de 4 en France, sont demandeurs d'outils pédagogiques afin d'enseigner l'anatomie, la physiologie, et surtout les mécanismes articulaires, poursuit-il. Des pièces anatomiques sculptées sont utilisées au cours de la formation, mais celles-ci sont fragiles et ne peuvent être emportées chez eux par les étudiants. D'où l'idée de reproduire les organes et articulations par impression 3D ! "Un procédé à la fois peu onéreux et facilement reproductible", estime Marie-Pierre Aulas, directrice générale de la Fondation Dassault Systèmes.

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Auteur de l'article original: Sarah Sermondadaz
Source: Sciences et Avenir
Date de publication (dans la source mentionnée): Samedi, 6. Janvier 2018
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