Bien plus qu'une réalité médicale, la maladie d'Alzheimer est en réalité une construction sociale pour décrire la vieillesse. Olivier Saint-Jean et Éric Favereau revisitent les quarante dernières années, avec ses errances, ses mensonges, mais aussi ses avancées, et montrent que la vieillesse n'est surtout pas une maladie ; que le déclin cognitif fait partie de la vie. Extrait de "Alzheimer, le grand leurre" du Pr Olivier Saint-Jean et Éric Favereau, publié aux éditions Michalon.

Et pendant ce temps-là... les politiques publiques ont pris leur temps. En termes de santé publique, dans les années 1980-1990 la vieillesse n’est pas franchement à l’ordre du jour. A-t-on vu François Mitterrand ou Jacques Chirac visiter un service de gériatrie? Certes, à l’occasion des campagnes électorales, le détour s’impose à tous les candidats de visiter les maisons de retraite qui ne s’appellent pas encore Ehpad (Établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). C’est d’ailleurs en 2001 que l’ensemble des maisons de retraite médicalisées sera regroupé sous ce terme unique.

La génération 68 occupant peu à peu tous les postes de pouvoir, il a fallu attendre peut-être qu’elle voie ses parents vieillir, puis diminuer, puis perdre leur autonomie? Faut-il remarquer que ce n’est que dans ces années-là que l’espérance de vie au-delà de 80 ans se met à augmenter?

Les politiques publiques Alzheimer vont peu à peu se détacher des politiques de la vieillesse, et quelque-fois se trouver en contradiction. Pour autant, elles sont, parfois, plus convergentes qu’on veut bien le dire. D’autant qu’elles participent de la même logique et qu’elles ne sont que les 2 facettes d’une même logique: celle d’une médicalisation de la vieillesse dont l’effet pervers principal est l’exclusion.

Pourtant, tout semble avoir bien commencé avec l’initiation de la mise à l’agenda politique de la vieillesse en 1962. Commandé à Pierre Laroque, père de la Sécurité sociale, un rapport jette les grands axes d’une politique dirigée vers cette catégorie émergente de Français. Ce que Pierre Laroque met au cœur d’une politique de la vieillesse, c’est l’intégration des vieux dans la société. Il ne construit pas de catégorie « vieux », source d’exclusion. Il veut juste l’égalité entre tous les citoyens au sein de la nation. (...)

 

Auteur de l'article original: Olivier Saint-Jean Le Pr Olivier Saint-Jean dirige le service de gériatrie de l'hôpital européen Georges-Pompidou
Source: Atlantico.fr
Date de publication (dans la source mentionnée): Samedi, 8. Septembre 2018
Photo: